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  • Photo du rédacteurMireille Eyermann

Une mort qui en vaut la peine Donald Ray POLLOCK Editions Albin-Michel



1917. Quelque part entre la Géorgie et l’Alabama. Le vieux Jewett, veuf et récemment exproprié de sa ferme, mène une existence de misère avec ses fils Cane, Cob et Chimney, à qui il promet le paradis en échange de leur labeur. À sa mort, inspirés par le héros d’un roman à quatre sous, les trois frères enfourchent leurs chevaux, décidés à troquer leur condition d’ouvriers agricoles contre celle de braqueurs de banque. Mais rien ne se passe comme prévu et ils se retrouvent avec toute la région lancée à leurs trousses. Et si la belle vie à laquelle ils aspiraient tant se révélait pire que l’enfer auquel ils viennent d’échapper ?

En 2011, « Le diable tout le temps », 1er opus de Donald Ray Pollock m’avait littéralement émerveillé, un vrai knock-out. Je me souviens avoir eu quelques difficultés à apprécier d’autres lectures pendant plusieurs mois. C’est donc avec impatience et une certaine appréhension que j’ai commencé ce second roman.

Pour être tout à fait franche « Une mort qui en vaut la peine » n’a pas eu le même impact sur moi, mais cela semblait difficile de faire un doublé de prime abord. Je dis de prime abord car ce roman est beaucoup moins évident et l'écriture plus insidieuse. Le poison coule plus lentement mais atteint ça cible avec la même force.

Les évènements se déroulent en 1917, aux Etats-Unis, pendant la première guerre mondiale et Donald Ray Pollock nous dépeint une fresque épique, avec une palanquée de personnages tous plus délirants les uns que les autres. Il y a énormément de choses dans ce roman, de l’aventure, de l’histoire, du western (eh oui…), du sexe, de l’alcool, du polar, du mystique…c’est foisonnant et absolument jubilatoire.

Moins noir que son roman précédant, enfin… moins désespéré, l’auteur s’ingénie à entrecroiser les petites histoires pour finalement en faire un tout éblouissant. Chaque histoire peut se lire comme une nouvelle, sans connexion avec les autres et au final, tout se tient. Plus d’une fois je me suis demandé comment il allait s’y prendre pour raccrocher les wagons tant les atmosphères sont différentes, mais il y arrive le bougre ! La construction est subtile et d’une extraordinaire intelligence.

Cet auteur à un talent de mise en scène indéniable, il distille ses anecdotes, sécrète les vices de ses personnages, suinte le mal tout au long des pages du roman, tout en coulant astucieusement un humour corrosif par petites touches, çà et là. C’est drôle et terrifiant. Du grand Art. Un Tarantino sous acides devant une fresque de Jérôme Bosch !

Donald Ray Pollock prouve par ce roman qu’il n’est pas l’auteur d’une seule merveille et c’est sans aucun doute un des écrivains les plus talentueux du moment.

C’est grinçant, violent, drôle, noir, glauque, caustique mais c’est surtout sacrement bien écrit. La force de ce roman c’est de vous emmener loin (et pas seulement géographiquement), de vous confronter à des hommes et des femmes qui quelque part sont arrivés au bout de tout et surtout d’eux-mêmes. Ça grouille, c’est chaotique, pas beaucoup de place pour de l’espoir ou une quelconque rédemption mais c’est avant tout profondément humain.

Comme un peintre, l’auteur décrit ses histoires par petites touches puis d’un coup de pinceau ravageur barbouille sa toile.

Il y a quelque chose d’exalté dans sa prose et quand ça va trop loin, une pirouette et vous voilà reparti sur les rails qu’il a choisi pour vous. Un sacrément bon bouquin.

Donald Ray Pollock est grand…lisez-le !

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